Dans l’une de ses lettres adressées à Fliess, datée du 30 juin 96, nous retrouvons la trace de la mort du père de Freud.
Il lui écrit : « Mon vieux père (il a 81 ans) se trouve à Bade dans un état de santé très critique, avec collapsus cardiaque, paralysie de la vessie, etc. Les seuls événements importants de cette quinzaine ont été l’attente des nouvelles et les visites que je lui ai faites… »
Le 26 septembre 96, il lui annonce sa mort : « Hier nous avons enterré mon vieux père mort dans la nuit du 23. Jusqu’à la fin, il s’est montré l’homme remarquable qu’il a toujours été. »
Quelques jours après, il lui écrit : Il faut que je te raconte un joli rêve que j’ai fait pendant la nuit qui a suivi l’enterrement. Je me trouvais dans une boutique où je lisais l’inscription suivante :
ON EST PRIE
DE FERMER LES YEUX
J’ai tout de suite reconnu l’endroit, c’est la boutique du coiffeur où je vais tous les jours ». Le jour de l’enterrement Freud était arrivé en retard, ayant du attendre chez ce coiffeur. La famille lui en avait voulu et de son retard et du fait aussi que ces funérailles étaient très modestes, selon le vœu de son père.
Freud interprète son rêve comme ayant un double sens : « il faut faire son devoir envers les morts ».
Cela ressemble, me semble-t-il, à un ordre du Surmoi, un rappel à l’ordre avec le sentiment de culpabilité qui l’accompagne. Mais l’autre sens est sans doute celui du devoir au sens propre à rendre aux morts et notamment celui d’avoir à leur fermer les yeux. Freud termine sa lettre par ce commentaire : « Le rêve émane donc d’une tendance au sentiment de culpabilité, tendance très générale chez les survivants… »
Freud reprend ce rêve dans l’Interprétation des rêves mais il modifie l’inscription qui se trouvait sur le tableau. Y est inscrit à la fois le singulier et le pluriel, un œil, des yeux.
Il l'utilise comme matériel de démonstration pour expliciter le travail du rêve et donc la façon de l'interpréter quand, dans un rêve, il semble y avoir un choix possible qui est marqué d'un "ou bien". Il nous indique que ce "ou bien" doit être remplacé par un "et" marquant la succession et non pas un choix.
Voici donc le texte de ce rêve tel qu’il le reprend :
" La nuit qui précéda l'enterrement de mon père je vis en rêve un placard imprimé, une sorte d'affiche, quelque chose comme le "Défense de fumer" des salles d'attente des gares. On y lisait
On est prié de fermer les yeux
ou
On est prié de fermer un oeil
ce que j'ai l'habitude d'écrire ainsi :
les yeux
On est prié de fermer ---------------
un oeil
Entre les deux versions, on s’aperçoit que Freud a modifié, sans doute sans s’en apercevoir, la date du rêve, puisque, dans sa lettre, il parle de la nuit qui a suivi la mort de son père et dans L’Interprétation des rêves, de la nuit qui a précédé cette mort. Par contre il se justifie davantage sur les reproches qui lui avaient été faits : "j'avais choisi le cérémonial le plus simple, sachant ce que mon père pensait de ces sortes de choses ; certains membres de ma famille m'avaient désapprouvé, objectant le qu'en dira-t-on. D'où l'expression allemande "fermer un oeil" (user d'indulgence) ».
Comme le rajoute une note du traducteur, en français, ces deux termes connectés par le "ou bien" un œil ou deux yeux n'auraient pas eu lieu d'être, puisque l'expression concerne les deux yeux et non pas un seul, celle de « fermer les yeux » pour pardonner une faute, par contre peut-être cette dualité aurait-elle été maintenue si par exemple il s'agissait d'une
inversion et qu'au lieu de "fermer l'oeil" il s'agissait au contraire de l'ouvrir, comme on dit "ouvrir l'oeil et le bon".
Donc il s’agit de rendre ses devoirs aux morts, d’être là et de leur fermer les yeux. Il s’agit aussi de culpabilité éprouvée à leur égard. Mais je rajouterais bien deux autres pistes d’interprétation : curieusement Freud ne nous dit vraiment pas grand-chose, quant à l'interprétation possible de ce rêve,est-ce que nous ne serions pas, nous aussi, priés d'avoir à fermer les yeux ? Sur quoi, peut-être sur ce que Lacan a appelé les péchés des pères. Mais pas seulement.
Parmi tous les rêves que Freud a analysé, dans son ouvrage, tout un chapitre est consacré rêves absurdes et il constate lui-même qu’il sont tous liés à la mort du père.
Le plus exemplaire est sans doute celui où son père joue le rôle d’un grand homme que Freud admirait beaucoup, Garibaldi.
Voici le texte de ce rêve « Mon père a joué, après sa mort, un rôle politique chez les magyars ; il les a unis politiquement. Je vois ici un petit tableau peu distinct :une foule comme au Reichstag ; une personne debout sur une ou deux chaises… Je me rappelle que sur son lit de mort il ressemblait beaucoup à Garibaldi et je me réjouis que cette promesse se soit réalisée. »Freud en rajoute ce commentaire : « Ceci est n’est-ce pas suffisamment absurde. »
Comment analyse-t-il ce rêve ?
Derrière cette « élévation » du père dont il fait un héros, un héros qui sauve, ce qui se cache c’est tout autre chose : « Cette « élévation » de nos pensées nous montre que c’est au vulgaire, au commun que avons affaire. » Ce que camoufle ce rêve c’est donc la découverte du corps réel du père, de son cadavre. Il l’illustre en effet d’un souvenir, la douleur d’une jeune fille, dont le père était mort dans la rue, lorsqu’elle avait constaté qu’il avait eu une selle au moment ou après sa mort. « La fille fût profondément malheureuse que ce détail très laid vînt gâter le souvenir de son père ». Freud en déduit le désir de ce rêve qu’il énonce ainsi « Apparaître après sa mort, pur et grand aux yeux de ses enfants, qui ne le souhaiterait ? »
Mais ne pourrait-on pas dire aussi qu’il s’agit de fermer les yeux sur le conflit qui surgit au moment de la mort du père entre l’image d’un père idéalisé, un grand homme, et, à l’opposé, cette image qui s’impose du corps du père et qui fait de lui un pauvre homme. Père imaginaire, d’un côté, père réel de l’autre, qu’advient-il du père symbolique, si nous nous référons aux trois registres lacaniens ?
Je ferais volontiers l’hypothèse que c’est le temps du deuil qui progressivement lui redonne son statut, c’est un temps de deuil mais un temps aussi ou, soit il y a une recrudescence des symptômes, soit une possibilité de sublimation. Pour ce qu’il en est de cette recrudescence des symptômes, nous avons un bel exemple avec le grand scénario obsessionnel de l’Homme aux rats, pour ce qu’il en est de la sublimation, nous pouvons en trouver une preuve dans ce que Freud nous en raconte dans la préface de la seconde édition de L’interprétation des rêves, écrite neuf ans après la première.
Il évoque le contenu du livre qui n'a pas subi de modifications importantes au fil du temps :
"... l'essentiel de ce que j'ai écrit sur le rêve et son interprétation et sur les théorèmes psychologiques qui en découlent restent inchangés ».
Il indique aussi que par rapport à toutes les incertitudes qu'il a rencontrées sur l'étiologie ou le mécanisme des psychonévroses, il a toujours pu "s'en tenir à ses premières assertions", grâce à cet ouvrage sur les rêves et la possibilité de les interpréter :
« Au cours des longues années pendant lesquelles j'ai travaillé au problème des névroses, j'ai eu bien des hésitations et, souvent, je ne savais plus que penser. Chaque fois c'est l'interprétation du rêve qui m'a rendu
l'assurance ».
Mais c'est surtout ce point que j'ai retenu :
"Pour moi, ce livre a une autre signification, une signification subjective que je n'ai saisie qu'une fois l'ouvrage terminé. J'ai compris qu'il était un morceau de mon auto-analyse, ma réaction à la mort de mon père, l'événement le plus important, la perte la plus déchirante d'une vie d'homme. Ayant découvert qu'il en était ainsi, je ne me sentis plus capable d'effacer les traces de cette influence".
Est-ce que ce livre de Freud qui se trouve être en quelque sorte l'épitaphe qu'il avait inscrit sur la tombe de son père, ne peut plus, en tant que tel, être modifié ?
Il est effectivement désormais gravé dans le marbre, le marbre de la psychanalyse.
(LE LIVRE BLEU DE LA PSYCHANALYSE -blog écrit par Liliane Fainsilber et David Berton).
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Le 26 mai dernier, je reçois un message de mon cousin germain, André Follin-Arbelet :
Contenu du message :
"Pour la petite histoire, lorsque Garibaldi a libéré la ville de Dijon de l'occupation prussienne, et qu'elle est retombée aux mains des Français et de leurs alliés le 30 octobre 1870, il a personnellement été hébergé plusieurs nuits par mon tri-aïeul Auguste Dubois alors maire de la ville......."
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Cette pas si petite histoire est confirmée par l'article de M. David François paru dans "L'AUTRE CÔTÉ DE LA COLLINE" - Le lundi 10 juin 2013 -Regards croisés sur l'Histoire Militaire - ISSN : 2270-7654.
Je remercie l'auteur et M. Stéphane Mantoux de m'avoir si aimablement permis de publier cette étude:
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1870-1871: l'armée des Vosges et les trois batailles de Dijon
Place du 30 octobre, rue Bossack, avenue du Drapeau, avenue Canzio sont des noms plus ou moins familiers pour les habitants de Dijon. Pourtant les événements et les personnes, tous liés à ce traumatisme national que fut la guerre de 1870 auxquels ils font référence sont largement oublié. Oublié aussi que la ville a élu député le 8 février 1871 le champion de l'unification italienne, le chef de l'expédition des Milles, le général Giuseppe Garibaldi alors commandant de l'armée des Vosges. L'historiographie a aussi largement négligé le rôle de la région dijonnaise lors de la guerre de 1870-1871. Si Sedan, Reichsoffen, Gravelotte, Bazeilles sont des lieux de bataille toujours bien identifiés, il n'en est pas de même pour Dijon où Allemands et Français se sont affrontés à trois reprises.
La Bourgogne est en effet une région clef dans l'affrontement qui s'amorce après la défaite de Sedan entre les forces allemandes et celles de la jeune IIIe République. Elle constitue un verrou qui commande l'accès à la vallée de la Saône et donc à Lyon mais surtout au bassin de la Loire où Gambetta réorganise l'armée de la République. En clair, si la Bourgogne tombe, disparaît tout espoir de retourner la situation et de prendre enfin l'avantage sur l'Allemagne.
L'oubli dans lesquelles sont tombées les trois batailles de Dijon a des origines éminemment politiques. A l'exception de la première bataille de Dijon en octobre 1870 les deux suivantes sont conduites par l'armée des Vosges, une armée qui au lendemain de l'armistice sent le soufre. Pour la France de l'Ordre moral elle est une abomination puisqu'elle rassemble les volontaires étrangers venus se mettre au service de la République, à l'image de son chef Garibaldi et de ses chemises rouges. Ces révolutionnaires et anticléricaux qui forment une Brigade internationale avant l'heure sont largement calomniés par les proches de Thiers. L'armée des Vosges si elle rassemble de nombreux étrangers compte pourtant dans ses rangs une majorité de Français organisés dans des corps de francs-tireurs. Cette seconde caractéristique est une tare dans la France vaincue puisqu'elle rappelle aux militaires leur incapacité en 1870, humiliation d'autant plus forte que que ces francs-tireurs et étrangers ont obtenu lors de la troisième bataille de Dijon une belle victoire contre les Prussiens. Et ce sont ces militaires qui, après 1870, prennent la plume pour écrire l'histoire de la guerre, négligeant ou minimisant le rôle de l'armée des Vosges et des combats de Bourgogne, tendance toujours perceptible dans l'historiographie française comme le montre la dernière grande synthèse de qualité parue sur la guerre de 1870, celle de Pierre Milza en 2009.
David FRANCOIS
La chute de Dijon et la naissance de l'armée des Vosges (octobre 1870).
Le 19 juillet 1870 la France de Napoléon III déclare la guerre à la Prusse. Rapidement le conflit tourne à la catastrophe pour la France. Après les défaites de Saint-Privat, Mars-la-Tour et Gravelotte, l'armée de Bazaine s'enferme dans Metz. L'armée de MacMahon est quand à elle vaincue à Forbach, Woerth et Reichsoffen avant d’être acculée à la reddition à Sedan le 2 septembre. L'Empereur est fait prisonnier. A l'annonce de ces désastres, le 4 septembre, la République est proclamée à Paris où se forme un gouvernement de Défense nationale.
Malgré le changement de régime la guerre continue. Fin septembre Paris est encerclée par l'armée allemande. Dans l'Est cette dernière conquiert l'Alsace. Strasbourg, assiégée, se rend le 28 septembre. L'armée du général von Werder est alors libre de descendre par le sud des Vosges puis la vallée de la Saône vers Lyon mais aussi la Loire par Nevers et Dijon. Alors que Léon Gambetta à Tours organise l'armée de la Loire qui doit délivrer Paris, la menace que représente les Allemands qui menacent de prendre à revers cette armée est prise au sérieux. Tenir la Bourgogne devient alors un enjeu fondamental pour la poursuite de la guerre. Mais pour tenir cette région il faut des troupes.
Pour tenir dans l'Est, le gouvernement de la Défense nationale ne peut alors compter que sur quelques milliers de gardes mobiles et des francs-tireurs. Ces deux types de formations sont nées de la loi militaire de 1868, la loi Niel. Cette dernière met sur place la réserve de l'armée, la garde mobile, formée par ceux pour qui le tirage au sort a été favorable ou bien qui ont réussi à se faire remplacer pour effectuer leur service militaire. La loi Niel prévoit également la formation des compagnies de francs-tireurs volontaires. La jeune République peut aussi commencer à compter sur l'arrivée de volontaires venues de l'étranger. Il s'agit de Français expatriés qui rentrent au pays et qui viennent des quatre coins du monde mais également d'étrangers qui veulent se mettre au service du pays de la Liberté. Le plus célèbre de ces volontaires étrangers est le héros de l'Expédition des Milles, le général Giuseppe Garibaldi qui, deux jours après la défaite de Sedan, propose ses services à la France. Le 7 octobre il débarque à Marseille précédé par des centaines de chemises rouges. C'est sur lui que le gouvernement de la Défense nationale compte s'appuyer pour tenir l'Est du pays.
Pour réussir sa mission Garibaldi doit d'abord former une armée. Il peut pour cela compter sur les volontaires garibaldiens mais également sur les autres volontaires étrangers, des Espagnols, des Polonais, des Grecs et même des Égyptiens. Il s'appuie aussi sur des groupes de gardes mobiles et de francs-tireurs. Nommé Commandant en Chef de la zone des Vosges de Strasbourg à Paris il s'installe à Dole le 13 octobre. Le 11 novembre il organise avec ces troupes éparses une armée formée de quatre brigades. Deux brigades sont placées sous les ordres de ses propres fils, Ricciotti et Menotti, les deux autres sont commandées par Louis Delpech vite remplacé par Cristiano Lobbia et Jozsef Bossack-Hauké un Polonais ancien officier du tsar mais qui s'est battu contre les Russes lors de l'insurrection polonaise de 1863. Jean-Philippe Bourdon dit Bordone est chef d'état-major tandis que le gendre de Garibaldi, Stefano Canzio, dirige le quartier général avant de prendre la direction d'une 5e brigade.
Carte des opérations de la guerre de 1870 (home.nordnet.fr)
La première bataille de Dijon (29-31 octobre 1870).
Pendant que l'armée des Vosges s'organise, les troupes allemandes du général August von Werder débouchent des Vosges et arrivent à Lure, à l'ouest de Belfort le 13 octobre. La vallée du Doubs est alors mise en défense par les Français mais les Allemands avancent vers l'ouest et passant par Vesoul marchent sur Gray en Haute-Saône, délaissant Besançon et Dole. Le 26 octobre ils sont à Gray et le prochain objectif qu'ils se fixent est Dijon. Le 27, jour où à Metz, Bazaine dépose les armes, l'armée allemande envahit la Côte d'Or.Une formation de francs-tireur, « l'armée de la Côte d'Or » du docteur Lavalle organise la défense de la capitale bourguignonne après avoir tenté de ralentir l'avancée allemande prés de Talmay. La défense est organisée avec l'aide du maire Auguste Dubois et du préfet d'Azincourt. Pour défendre la ville il y a aussi la garde nationale et des Mobiles de la Loire, de l'Isère, de l'Yonne et de la Haute-Garonne. Pourtant le général Fauconnet qui commande l'ensemble des troupes régulières dirige un conseil de guerre qui décide à la fois de désarmer la garde nationale et de retirer les troupes sur Beaune. Le 29 octobre les troupes parties, Dijon n'est plus défendue. Les Allemands arrivent alors à Montmuzard à l'ouest de la ville défendue par quelques volontaires. Mais la population dijonnaise, qui est farouchement républicaine, refuse le départ des troupes. Fort de ce soutien, le préfet décide de rappeler les troupes de Beaune, troupes qui rejoignent Dijon dans la nuit du 29 au 30 octobre.Le 30 octobre, deux brigades badoises approchent de la cité des Ducs de Bourgogne. Des francs-tireurs tentent de ralentir cette progression mais les soldats allemands parviennent à s'emparer du village de Saint-Apollinaire à l'est de la ville et, malgré la résistance des Mobiles de la Lozère, de l'Yonne et de la Côte d'Or, pénètrent finalement dans la ville. Le général Fauconnet est tué quand à lui dans les combats qui ont lieu à l'est de la ville mais aussi vers Fontaine-lès-Dijon et Montchapet à l'ouest de Dijon. Les combats durent près de cinq heures avec l'active participation de la population civile. Une barricade est ainsi construite rue Jeannin. Des civils font le coup de feu tandis que les Allemands en exécutent sommairement quelques-uns en représailles. Au final les Badois perdent 1 600 hommes durant la journée et finissent par se retirer. Mais cette victoire est amère pour les Dijonnais puisque les troupes françaises reculent également jusqu'à Beaune. Le 31, Dijon, sans défenseurs, doit finalement capituler et les Badois entrent dans la ville.
La guerre n'est pas pour autant terminée en Côte d'Or. A Beaune le général Camille Crémer rassemble des troupes éparses dans le quadrilatère Auxonne-Saint-Jean de Losne- Nuits-Saint-Georges-Dijon, tandis que des groupes de francs-tireurs tiennent la vallée de la Saône. Les Allemands ne restent pas inactifs et début novembre ils marchent en direction de Dole où ils savent que Garibaldi organise son armée des Vosges. Mais le détachement badois fait face à une véritable guerre de guérilla et doit finalement rebrousser chemin le 5 novembre. Les Allemands essayent aussi d'avancer vers le sud et atteignent Nuits-Saint-Georges. Là aussi ils doivent affronter une guerre de guérilla. Face à ces résistances les Allemands ne sortent plus de Dijon que pour effectuer des raids et mettre en coupe réglé la campagne. Mais les risques sont grands là aussi car les francs-tireurs, qui connaissent bien la région et sont renseignés par la population, réalisent des embuscades meurtrières comme à Vougeot le 20 novembre.
Pendant ce temps l'armée des Vosges de Garibaldi a quitté Dole pour rejoindre Autun où elle arrive le 9 novembre. L'armée a reçu de Charles de Freycinet, délégué à la Guerre du gouvernement, une nouvelle mission : empêcher que les Allemands qui sont à Dijon ne se portent sur la vallée de la Loire. Pour mener cette mission Garibaldi ne dispose que de 6 000 hommes et presque pas d'artillerie ni de cavalerie. L'armée des Vosges prend donc ses quartiers à Autun, ville de province conservatrice et catholique où la cohabitation est délicate avec des garibaldiens qui ont tiré en 1867 sur les soldats du Pape.
La seconde bataille de Dijon (novembre 1870).
Les Allemands qui sont à Dijon et occupent le nord et le centre de la Côte d'Or ne sont pas assez nombreux pour mener de grandes opérations mais Garibaldi sait également que son armée n'est pas encore de taille pour les affronter dans une bataille traditionnelle. Garibaldi souhaite alors organiser des opérations de guérilla sur une grande échelle afin d'immobiliser le maximum de troupes ennemies. Mais les Allemands ne sortent guère de leurs garnisons et postes. Le général de l'armée des Vosges décide néanmoins d'organiser une action sur Dijon qui doit être soutenue par des attaques de diversion au nord et au sud de la ville.
Au sud de la capitale bourguignonne, le commandant Lhoste organise une embuscade vers Fixin et capture au matin du 21 novembre une patrouille de soldats badois. Puis le 22 ses hommes parviennent à repousser à Chamboeuf un contingent allemand venu les déloger. Pour l'opération au nord Ricciotti Garibaldi dirige la IVe brigade avec pour mission de passer entre Auxerre et Troyes afin de détruire les lignes de communication entre Strasbourg et Paris. Le 14 novembre la brigade quitte Autun pour Saulieu. Quand Ricciotti Garibaldi apprend qu'une garnison d'environ un millier de soldats allemands se trouve à Châtillon-sur-Seine il décide de mener un raid. Le 19 novembre à l'aube ses hommes entrent en silence dans la ville. Le capitaine Michard doit s'emparer de L'Hotel de la Côte d'Or où logent les officiers prussiens. Au signal Michard et ses hommes s'emparent de l’hôtel et capturent ceux qui s'y trouvent tandis que les autres détachements pénètrent dans les maisons qui longent la Grand Rue et mettent hors de combat les Allemands qui y logent. Les soldats allemands qui dormaient dans les autres quartiers se regroupent autour de la mairie. Devant la résistance prussienne qui s'organise, les francs-tireurs décident de se retirer et se dirigent vers Semur-en-Auxois. Dans la bataille les Français ont capturé 123 fantassins et 44 cavaliers prussiens mais aussi six voitures de bagages. Durant le combat le major Alvensleben, le frère des généraux qui commandent les IIIe et IXe corps allemands a été tué.
Quand Garibaldi apprend l'exploit de son fils il estime que le moment est propice pour effectuer son coup de main sur Dijon. Pour cela il organise ses troupes en deux colonnes d'attaque, la première doit progresser par le nord le long de la voie ferrée venant de Paris tandis que la seconde doit suivre la vallée de l'Ouche pour atteindre la capitale de la Bourgogne. Pour que l'opération réussisse il faut néanmoins que joue l'effet de surprise. Mais le 25 novembre, la colonne que dirige Bossack est repérée par le poste allemand de Velars.
Le 26 au matin les troupes de Garibaldi montent sur le plateau qui domine Dijon au nord-ouest. Mais sur ce plateau se trouve la brigade badoise du général-major von Degenfeld. Garibaldi en personne lance le signal de l'attaque. Les Badois sont alors obligés de battre en retraite. Ils abandonnent le village de Prenois pour se regrouper à Darois le long de la route de Troyes. Finalement les Garibaldiens atteignent Darois où ils passent la nuit. Garibaldi qui a apprécié la combativité de ces troupes prend la décision de s'emparer de Dijon par la force. Le 27 au matin la troupe reprend sa marche en avant. Mais elle rencontre les Badois de la 9e compagnie qui l'attendent entre les deux buttes de Talant et Fontaine-lès-Dijon qui commandent l'accès à Dijon. Par six fois les Garibaldiens tentent de briser les défenses allemandes. Ils n'y parviennent pas et doivent se retirer. Les Allemands, qui veulent profiter de l'occasion pour éradiquer toute nouvelle menace, concentrent des troupes et se lancent à la poursuite des Garibaldiens. Delpech qui commande la 3e brigade de l'armée des Vosges stationne à Pasques avec pour mission d’arrêter l'avance allemande. Il parvient à stopper les poursuivants puis se retire à Ancey où là encore il ralentit la progression allemande. Pendant ce temps Garibaldi regroupe ses forces à Lantenay avant de rentrer à Autun.